H1: mécanique fluidique

H1: mécanique fluidique

On connaissait les clepsydres. La plus ancienne retrouvée à ce jour date de l’époque des pharaons. Il aura fallu attendre 3400 ans pour s’affranchir de la force de la gravité et indiquer l’heure avec un fluide dans une montrebracelet mécanique. Beaucoup en ont rêvé, HYT l’a fait.

Le principe

Rencontre entre haute horlogerie et mécanique des fluides. Une utopie à priori. Balayant toutes les certitudes, laminant le conformisme, l’idée-force qui a conduit à la H1 est pourtant simple : deux réservoirs flexibles soudés, fixés à chaque extrémité d’un capillaire. Dans l’un, un liquide aqueux chargé de fluorescéine. Dans l’autre, un liquide transparent visqueux. Pour les maintenir séparés : la force de répulsion des molécules de chaque fluide. Délimitant la frontière entre les deux : le ménisque.

A 6 heures, les deux réservoirs. Tandis que le premier se compresse, l’autre se détend, et inversement, entraînant le mouvement des fluides dans le capillaire. Au fil des heures, le liquide fluorescent avance. Le ménisque, en forme de demi-lune, marque le point de rupture avec l’autre fluide dans le tube, indiquant l’heure. Arrivé à 18h, le liquide fluorescent revient en position initiale, dans un mouvement rétrograde. Le secret pour actionner les réservoirs ? Deux soufflets en alliage électro-déposé extrêmement souples et résistants, mus par un piston. Et c’est pour activer ce système qu’intervient l’horlogerie.

Un mouvement mécanique pour actionner le système fluidique

Orchestré par Bruno Moutarlier, avec le concours de Jean-François Mojon et son équipe de Chronode SA : un mouvement mécanique. Logé dans la partie supérieure de la montre, il entraîne une came. Celle-ci pousse le piston, qui vient actionner le soufflet.

Le principal défi a consisté à trouver une interface entre mouvement mécanique et système fluidique dans un circuit fermé et étanche. D’abord, le volume à disposition pour loger les deux était réduit. Ensuite, il s’est agi de les monter séparément pour les garder autonomes, puis de les faire fonctionner ensemble. Une intégration modulaire pour le moins délicate, qui a engendré d’autres contraintes, comme le montage du cadran en deux parties, par les côtés.

De la conception à la réalisation : convergence de deux mondes vers un objectif commun

Si l’idée de base est en soi simple, sa concrétisation est pour le moins complexe. Sous la direction de Bruno Moutarlier, deux équipes s’y sont collées. Pour la partie horlogère : Jean-François Mojon et ses acolytes de Chronode. Pour la partie fluidique : Preciflex, la société dépositaire des brevets créée par les fondateurs de HYT – Patrick Berdoz, Lucien Vouillamoz et Emmanuel Savioz. Pour épauler Preciflex : Helbling Technik, issu du domaine médical, où le fluid motion est utilisé dans certains traitements. Une formidable aventure humaine qui propulse deux mondes à priori aux antipodes vers une nouvelle ère commune : celle d’une technologie unique qui chamboule non seulement l’horlogerie, mais également le medtech, puisque ce système de pompe ouvre la voie à des applications inédites dans le domaine.

Exploration horlogère aux confins des nanotechnologies

Etape N° 1 : élaborer des fluides qui obéissent à un cahier des charges horloger. Couleur, texture homogène, résistance aux vibrations, aux chocs et aux variations de température, pas d’altération à long terme, étanchéité à toute épreuve. Des impératifs qui ont nécessité la mise au point de nombreuses innovations. A ce jour, sept brevets ont été déposés pour la technologie et un pour le design. Une plongée vertigineuse dans l’inédit, qui a conduit les prouesses techniques horlogères aux frontières des nanotechnologies.

Dompter les besoins en énergie

Qui dit force hydraulique dit pression. Lorsque le liquide chargé de fluorescéine a accompli un tour complet et arrive vers 6h / 18h, la pompe émettrice se comprime, tandis que le soufflet récepteur se détend, générant de la résistance, et donc un besoin accru en énergie. Pour y remédier, Preciflex a développé des soufflets totalement novateurs. En alliage très fin, à la fois extrêmement souples et résistants, ils sont inspirés des capteurs de mesures utilisés par la NASA et leur conception a dû être adaptée aux besoins horlogers. Leur forme spécialement étudiée permet de diminuer l’énergie nécessaire à leur compression, d’absorber les chocs et d’assurer une étanchéité à toute épreuve.

Métaphysique des fluides

Tout au long du processus de développement, mené parallèlement à l’engineering, les quantités de liquides auront fait l’objet de toutes les attentions. Chaque microlitre compte, et le volume total dans le circuit fermé est extrêmement précis, le système devant présenter une étanchéité qui confine aux nanotechnologies. De par le rapport inhabituel entre la couronne et les fluides, un système de mise à l’heure spécial a été conçu afin d’éviter que le liquide ne circule trop rapidement et vienne endommager le ménisque.

Accélérateur d’émotions

Nerveux, agressif. Le design signé Sébastien Perret impose le caractère chargé de testostérone de la H1. Une construction hors normes. Une architecture tridimensionnelle, révélée aussi bien de face que de profil ou de ¾, par une sculpturale glace saphir de 5mm taillée dans la masse. Dominant ce bloc, le dôme à 6h revendique ses propres lois. De lui jaillissent les particules de fluorescéine, comme suspendues dans leur fuite des heures. Vers lui convergent pistons et soufflets au tempérament industrieux. Comme déstructurée, la partie supérieure de la montre dicte une géométrie faite de strates et de reliefs. Au centre, le régulateur minute, chevauché par une petite seconde exaltée qui rappelle furieusement une roue à eau. A 2h30, une réserve de marche de 65 heures découpe la charge disponible sur trois arcs de cercle. Et pendant ce temps, les fluides poursuivent leur course dans le pourtour de la boîte. Une « bête » de 48.8 mm de diamètre et de 17.9 mm d’épaisseur qui impressionne par sa légèreté et sa chute parfaite au poignet. Les encoches de sa carrure viennent prolonger les index baignoire en applique, tandis que dans l’axe du calibre, la couronne s’arrime à 2h30, comme poussée par son imposant protège-couronne.